Le cri du coeur de la rentrée

mardi 15 septembre 2009

Chez Article XI ils traitent plein de sujets, dont la littérature avec dernièrement Brautigan ou encore Pancho Villa et Taibo II sous la plume du chroniqueur JBB. Nous lui avons demandé une liste, qui s'est transformée en hymne à un auteur comme vous allez le voir...

La classe ouvrière dans ta face

Tu vas voir, il en est qui couineront comme des porcinets qu'on égorge. Des autoproclamés gardiens du temple n'acceptant que la poussière des années et l'agrément du cénacle pour reconnaissance de la valeur littéraire, empêcheurs d'aimer en rond et de sacraliser en paix. Tu vas voir - aussi - qu'il s'en trouvera pour contester au bonhomme l'appellation "roman noir". Les mêmes - sans doute - ont rédigé la notice Wikipédia de King, si succincte qu'elle confine au sabotage : "John King est connu pour son refus de l'establishment littéraire, y lit-on après sa date de naissance (1960) et une phrase pour citer ses bouquins, sa posture 'populiste' ou 'populaire' selon les avis, son intérêt pour la classe ouvrière et son goût pour les sujets originaux (mouvement punk, hooliganisme…)." Cinq lignes, cas expédié, affaire réglée.

Une posture "populiste" ou "populaire" ? Mon cul !, répondrait l'auteur. John King est la classe ouvrière anglaise, voilà tout, celle qui s'est faite thatchériser par Margaret comme par les tartuffes de la gauche libérale, qui n'a jamais un rond sur son compte en banque, enchaîne les boulots merdiques et surnage d'expédients dans des banlieues grisâtres. John King écrit les laissés-pour-compte-de-tout-solde, pauvres, brutaux et racistes, beaucoup moins joyeux que les Irlandais de Roddy Doyle, moins drogués et envâpés que les personnages d'Irvine Welsh. Ceux qui boivent beaucoup. Se battent énormément. Baisent, de temps en temps et ce n'est jamais génial. Et survivent, tout juste. Reste le foot, leur truc, passion, identité, jusqu'à ce qu'on leur vole, prix des places atteignant des hauteurs stratosphériques, clubs se négociant en bourse et petits branleurs de la City s'arrogeant les tribunes.

Que je te dise : le foot, je n'aime pas. Mais le football de King, ces prolos qui attendent le week-end pour dévaster les stades, défoncer les supporteurs adverses et déverser leur haine sur un pays qui n'a cessé de les repousser davantage dans les limbes, je respecte. Pas que je goûte la violence, hein. Mais juste : King dit combien les hooligans anglais, déclassés à qui on a tout piqué même l'honneur, n'ont guère d'autre moyen de cracher leur haine pour le système que d'affûter les battes et manier les couteaux. Dans Football Factory, La Meute et Aux Couleurs de l'Angleterre (trilogie autour du foot et du hooliganisme, parue aux éditions de l'Olivier), ils se battent, à cent contre cent ou cent contre un, se fixent rendez-vous pour combattre ou se remettent de la baston : rien d'autre ne compte, sinon la bière. C'est débile ? Pis encore, mais c'est ainsi. Et il n'est personne pour l'écrire mieux que King, un style de tronçonneuse nourrie aux amphétamines, des phrases tranchantes comme des cutters balancés en pleine face et une posture exempte de tout mépris ou commisération. Sauvage et vrai.

Voilà. Je te parlerais bien aussi de Human Punk, autre des bouquins de John King publiés en France, mais je crains d'avoir fait long, déjà. Sache juste qu'il est un peu plus joyeux, un chouïa moins sombre et surtout moins violent, centré sur la musique et non sur le foot. King se boboiserait ? Je n'en sais rien. Et pour être honnête : je m'en fiche. Le seul truc qui compte, c'est que ça déchire toujours autant du steak.

La liste de lecture de JBB :

John King, TOUT !

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